<%@LANGUAGE="JAVASCRIPT" CODEPAGE="1252"%> Gilbert Mazliah, artiste, peintre, enseignant, Genève, Suisse
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Peintures
sur relief

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La grande spirale
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La grande spirale à la pierre noire
(1983-1984)
Cette décoration pour l'entrée du Théâtre des Marionnettes s'inscrit dans une suite d'objets que j'ai menée parallèlement à la peinture depuis 1975. Elle en est, en quelque sorte, l'aboutissement en contrepoint avec un autre grand travail qui a précédé : « Le grand Carrousel », objet pénétrable (1977-1981).

Ce genre d'activité a commencé sans que je comprenne vraiment ce qu’elle signifiait et quelle était son importance ; comme malgré moi. La peinture que je faisais alors, devenant de plus en plus immatérielle, j’avais besoin d’un contact plus physique avec mon travail. Cela s’est concrétisé en commençant ces sortes de dessins-peintures-sculptures dans l’espace. J’y ai découvert le langage spécifique d’autres matériaux, surtout ceux rarement utilisés en sculpture, comme le tissu, le fil, la plume,etc. permettant de faire et d’exprimer des choses impossibles avec la pierre et le métal.

Sans l’avoir cherché, dans ce travail, j’étais plus en relation avec l’art de civilisations dites « primitives » ou « premières », qu’avec les sources directes de l’art occidental. J’ai redécouvert ainsi des valeurs perdues par notre société qui met l’accent plutôt sur l’efficacité et la rentabilité, tendant à oublier, dans l’acte créateur, la relation spirituelle de l’homme avec son environnement.

Il est vrai que ces valeurs, pareillement à ces objets, sont fragiles, et – comme le disent les Japonais de leurs peintures sur papier – leur durée dépend moins de leur solidité, que du désir de ceux qui en ont la garde de les conserver.

L’objet du Théâtre des Marionnettes est le premier de toute la série à être de fixe. Jusque là, mes expositions ressemblaient à un spectacle de saltimbanques démontant et remontant leur tente de ville en ville ; et mes objets étaient conçus dans cette optique nomade. Celui-ci est suspendu par des fils comme une marionnette, tenu définitivement au plafond par 37 points d’ancrage.

Alors que « Le grand carrousel » peut tourner autour du spectateur (qui s’est placé en son centre après un cheminement spiralé), « La grande spirale à la pierre noire » est mise en mouvement, et devient spectacle, par le déplacement du spectateur dans l’escalier tournant autour d’elle, de la salle de théâtre au bar du premier étage.

Cet objet, comme le premier, a été construit en suivant une sorte de serpent de sisal, à la queue tripartite, qui traverse 27 plans rectangles de tissu transparent se succédant en spirale, au rythme des trois couleurs principales : rouge, jaune, bleu. Comme dans le « Le grand carrousel », seuls neuf plans sont visibles dans leur totalité, mais ici les rectangles s’allongent en allant vers le centre, alors que là ils diminuent en gardant la même proportion. Lien apparent entre le haut et le bas, ici le serpent descend autour de la lumière qui, partant de la tête du serpent, éclaire une pierre noire, verticalement ovoïde, fixée sur le sol trois mètres plus bas. Celle-ci est séparée en deux par une plaque de plexi translucide ; prise en sandwich, et diffusant la douche lumineuse sur son rebord apparent. Pour le spectateur cela provoque l’illusion que la lumière vient de l’intérieur de la pierre.

Les couleurs, comme les nombres qui construisent ce travail, ne sont pas innocents. Par exemple, le produit de 27 par 37 est remarquable ; les nombres 27 et 28 (3 x 3 x 3 et 4 x 7) qui structurent et rythment ces deux grands objets peuvent être mis en relation avec le cycle lunaire ou celui de Saturne. Ils sont également à la base de plusieurs alphabets et sont utilisés dans ces contextes sur un plan ésotérique. Pour résumer, ils y symbolisent tous les états d’un cheminement, avec ses étapes successives intérieures et extérieures, de la naissance à la conclusion ou l’accomplissement, souvent, eux-mêmes, départ d’un nouveau parcours.

Je n’ai voulu, ici, qu’effleurer ce type de méditation qui a été provoquée en moi par et durant l’élaboration de cet objet. Je crois, bien sûr, qu’on peut l’aborder sans rien en savoir. Je voulais juste l’évoquer car, sans cet aspect de ce travail, cette « décoration » n’aurait pas été ce qu’elle est. De plus, pour celui qui voudrait développer la contemplation de cet objet à ce niveau, ces quelques indications peuvent lui servir de clés…


Gilbert Mazliah, novembre 1984
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